mercredi 28 septembre 2011

Les Aborigènes, doyens du monde




Une étude montre qu'ils sont les survivants des premiers hommes sortis d'Afrique. 



Les Aborigènes d'Australie semblent bien être le peuple le plus ancien de l'humanité, hors Afrique. Tel est le résultat obtenu par une vaste étude génétique, regroupant 31 chercheurs danois, chinois, français, australiens, hollandais, allemands, américains… Leur étude, publiée dans le dernier numéro de la revue Science, éclaire d'un jour nouveau les chemins empruntés par l'espèce humaine pour coloniser la planète.

Tout est parti d'une petite touffe d'une vingtaine de cheveux extraits des mèches données en 1923 à un professeur d'ethnologie et d'anthropologie, le Dr Haddon, par un jeune Aborigène d'une vingtaine d'années dans la partie sud-ouest de l'Australie. Les cheveux étaient bien conservés et leur couleur allait du rouge-orange au brun, souvent sur un même cheveu. L'avantage pour les chercheurs est que cette région du continent australien est restée assez «préservée» des colons blancs. Le génome de ce jeune homme, décrypté à partir de seulement 0,6 gramme de ses cheveux, avait donc toutes les chances d'être le plus près possible de celui des premiers Aborigènes.

«En dehors du résultat scientifique des analyses d'ADN, le point clé est que l'on a travaillé avec les populations concernées. Elles ont été impliquées tout au long du processus, insiste Ludovic Orlando, l'un des principaux signataires du papier, chercheur français qui travaille au Muséum d'histoire naturelle du Danemark, à Copenhague. Nous avons obtenu l'autorisation du Conseil des Aborigènes de la région, et la première conférence de presse a été faite là-bas, en Australie. »
Une fois extrait, l'ADN a été placé dans des machines à séquencer. Ce qui a donné un immense puzzle de petits bouts d'ADN. Grâce à des génomes de référence, la «carte» du génome aborigène a pu être reconstituée. «Nous ne l'avons pas totalement séquencé, admet Ludovic Orlando. Mais nous en disposons de plus de la moitié. Avec une précision et un indice de confiance tout à fait raisonnables. » Cette carte a été comparée à d'autres, venues de divers endroits du monde. «Nous avons pour notre part fourni les données concernant une ancienne population népalaise», explique François-Xavier Ricaut, de l'université de Toulouse. Les Chinois ont eux aussi fourni des données comparatives.

D'autres vagues de peuplement 

Résultat : d'après le scénario, largement accepté, selon lequel l'Afrique orientale serait le berceau d'Homo sapiens, celui-ci serait sorti de ce continent pour, petit à petit, gagner les autres. Sapiens arrive en Europe il y a environ 45.000 à 50.000 ans. Mais les Aborigènes seraient arrivés en Australie bien plus tôt, entre - 62.000 et - 75.000 ans. « C'est donc le premier groupe à avoir un “succès” et à être parvenu à survivre jusqu'à aujourd'hui , estime Ludovic Orlando. Y a-t-il eu d'autres vagues de peuplement, plus tard ? On ne peut trancher formellement. Mais il est sûr que les Aborigènes d'Australie sont issus d'une migration différente de celle qui a donné naissance aux Asiatiques modernes. »

Il faut savoir qu'il y a 60 000 ou 70.000 ans, la géographie terrestre était un peu différente de celle que nous connaissons. Le niveau des mers était beaucoup plus bas. L'Australie et la Nouvelle-Guinée étaient réunies et un bras de mer d'environ 80 km séparait l'Australie du continent asiatique par Bornéo. Une distance encore importante mais pas insurmontable pour ces hommes épris de conquête.

Jean-Luc Nothias

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